Visite de l’île abandonnée d’Ikeshima

Jeudi 05/04

Cette journée, nous l’attendions depuis longtemps. Nous avions prévu de visiter une île abandonnée : Ikeshima. Enfin, il reste encore quelques habitants mais son visage a bien changé par rapport à son passé.

L’île d’Ikeshima ne doit pas être confondue avec celle d’Hashima (une autre île proche de Nagasaki, totalement abandonnée et rendue célèbre par le film James Bond : Skyfall ; mais qui n’est pas « visitable » autrement que par un circuit touristique payant qui ne fait que s’arrêter à un ponton). Contrairement à Hashima, il est donc possible de visiter librement Ikeshima qui est situé au nord ouest de Nagasaki et qui fait 4km de circonférence. Elle accueillait autrefois une mine de charbon ayant ouvert ses portes en 1959 et qui était l’une des deux dernières du pays avant sa fermeture en 2001. À son apogée pendant la croissance de l’après-guerre au Japon, l’île comptait environ 8 000 hommes, femmes et enfants vivant dans de vastes complexes d’appartements (70 immeubles au total, dont certains ont depuis été rasés).

Avant cela, l’île était surtout connu pour son étang (son nom signifie l’île de l’étang) et personne ne savait qu’elle était posée sur un lit de charbon. A partir de 1959, c’est une entreprise qui pris possession de l’île afin d’en exploiter ses ressources. Son étang fut ainsi transformé en port et la mine de charbon et toutes les infrastructures que cela implique furent créés. Cette île avait donc toutes les infrastructures d’une petit ville pour accueillir des milliers de mineurs et leurs familles : écoles, commerces, hôpital, gymnase, piscine, poste, temple … Mais avec la concurrence des autres énergies à l’orée des années 90, la rentabilité de la mine commença à baisser, entraînant sa fermeture définitive en 2001, il y a 17 ans. Il reste actuellement une centaine d’habitants sur l’île, la plupart étant d’anciens mineurs ou des membres de leurs familles.

L’île compte naturellement un grand nombre de bâtiments et d’infrastructures abandonnées où la nature reprend petit à petit ses droits. Son abandon relativement récent assure néanmoins un état bon général des habitations. Ce n’est pas le cas des infrastructures en métal liées de prêt ou de loin à l’extraction et au traitement du charbon qui sont très attaquées par la rouille et pour certaines en partie effondrées. La mine quant à elle est ouvert au public -sous réserve d’appeler avant pour réserver- avec une visite de celle-ci jusqu’à 300 mètres de profondeur sur un petit train.

Nous voici donc au petit matin à prendre la direction du port de Konoura à une petite heure de route de Nagasaki. Nous devons ensuite monter dans une navette en bateau (20 minutes) pour 350 yens (2,60€ environ) afin de rejoindre le port de l’île (point 1). Un ferry fait également le trajet deux fois par jour, pour ceux désirant y aller en voiture.

A notre arrivée, nous voyons tout de suite la gigantesque structure métallique qui nous accueille. Celle-ci, située en bas de la petite montagne de l’île, est impressionnante. Son état est déplorable et tous ses abords sont fermés au public, et heureusement. Après avoir dépassé les premiers immeubles occupés, parfois par une seule personne, nous arrivons devant l’entrée principale de la mine (point 2), celle qui est ouvert aux touristes ayant réservés un tour en petit train, ce n’est pas notre cas. Nous longeons donc l’immense structure avec interrogation : « à quoi servait cette structure ? » « comment fonctionnait-elle ? » … Nous continuons vers le sud de l’île en utilisant la route principale qu’emprunte un petit bus toute la journée pour permettre aux résidents, parfois âgés, de se déplacer.

Nous arrivons au niveau d’un complexe d’entrepôts géants (point 3) où nous ne attarderons pas longtemps, il y avait peu de chose à voir à cet endroit, si ce n’est ce qui nous semble être une deuxième entrée dans la mine, interdite au public celle-ci.

Nous commençons à apercevoir au loin les premiers immeubles d’habitation abandonnés vers lesquels nous avançons.

Nous prenons la première rue d’un lot d’immeubles complètement désaffectés depuis 2001 (point 4). Ceux-ci se ressemblent tous, 4 étages, 8 appartements, seule la végétation les recouvrant change. Nous entrons dans le premier dont la porte principale n’est pas scellée. Parmi les 8 appartements, un seul n’aura pas sa porte d’entrée verrouillée. Il est dans un état impeccable mais a été complètement vidé du mobilier.

Nous remontons la rue jusqu’à un petit parc pour enfant, avec des balançoires dans un sale état. Nous croisons à l’occasion un premier chat, il y en a énormément sur l’île, et ils ont un terrain de jeu qui semble leur plaire.

Au bout de la rue, nous trouvons un petit pavillon qui n’est pas fermé. Nous nous y engouffrons et trouvons là une maison quasiment intacte, avec du mobilier et des effets personnels. L’excitation de découvrir un lieu abandonné est bien présente, et le fait que tout soit resté en place y contribue beaucoup. Cela donne l’impression que les gens sont partis dans l’urgence ce qui n’est pourtant pas le cas à notre connaissance.

 Un peu plus loin, au bord de l’île, une plateforme surélevée nous permet de voir un peu plus le relief au loin et de repérer un gros bâtiment que nous pourrons peut-être visiter.

Nous trouvons l’entrée sans difficulté (point 5). Il semble que ce lieu ait servi de centre de formation pour des futurs mineurs indonésiens en 2007 puisque nous trouvons une exposition photo à ce sujet. Avant cela, nous pensons qu’il servait aux mineurs pour se changer avant d’aller à la mine en enfilant la combinaison (masque, lampe torche, etc…) et pour se nettoyer en sortant. La structure sur le toit ressemble à un extracteur permettant de remonter le charbon.

Nous ressortons de ce bâtiment pour continuer vers le nord de l’île, où se trouve les lieux plus actifs car encore utilisés. Sur le chemin, nous croisons de nouveaux immeubles abandonnés avec une architecture différente, ils sont nettement moins bien conservés.

Nous repérons vite l’école et le gymnase, organisés autour d’un stade multisport. L’école (point 6), qui est très grande (probablement pour accueillir plusieurs centaines d’élèves) était encore ouverte il y a peu avec seulement 2 étudiants ! De l’extérieur, nous avons vu un professeur dans une des salles, nous avons donc respecté le fait que ce bâtiment ne soit pas abandonné et nous ne sommes pas entré. Cela semble indiquer qu’il y a toujours quelques étudiants dans l’école. Nous poursuivons notre route en passant à côté de la piscine.

Arrivés devant un lieu qui semble être une ancienne auberge (point 7), nous entrons pour faire initialement un tour aux toilettes. Un monsieur d’une soixantaine d’années sort d’un petit local pour venir me voir au niveau de la réception, je lui demande si cet endroit est le musée (nous avions lu qu’il y en avait un). Il m’explique qu’il s’agit en fait d’un hôtel mais qu’il y a une exposition sur l’île dans le hall principal. Gaëlle me rejoint, nous commençons la visite de l’expo. Celle-ci nous permet d’en apprendre un peu plus sur l’île et le monsieur qui ne doit pas voir beaucoup de monde ne nous quitte pas d’une semelle, il se fait une joie de nous expliquer comme il peut les choses, en Japonais et avec les mains. Nous lui posons un tas de questions. La maquette d’Ikeshima en fin d’exposition nous permet d’échanger et d’en savoir plus sur la fonction de certains bâtiments. Nous apprenons ainsi qu’il y avait deux entrées à la mine, une principale et une secondaire. Nous comprenons que ce monsieur est un ancien mineur et qu’il est sur l’île depuis 40 ans ! Il est fier de nous expliquer son travail et comme tout était organisé sur Ikeshima.

Il nous invite à monter aux étages pour nous montrer une autre pièce avec des photos, arrivés dans celle-ci, il nous prend pas le bras pour nous montrer une photo. Celle-ci lui tient à cœur car il est dessus, sur la droite :

Cela nous fera sourire, d’autant plus que nous avions pris une photo avec un angle quasi similaire quelques minutes auparavant :

Nous lui demandons enfin s’il est heureux d’être resté ici, il nous répond avec un gros sourire par l’affirmative. L’échange avec ce monsieur aura duré un bonne demie-heure, et il nous aura même guidé pour trouver l’ancien hôpital de l’île, qui est situé juste à côté d’un petit bâtiment utilisé actuellement comme nouvel hôpital.

Nous prenons la direction de l’ancien hôpital (point 8) et cherchons un moyen d’y pénétrer. Après quelques instants, nous trouvons enfin un chemin, les portes automatiques ne sont pas bloquées, nous entrons, l’excitation est à son comble. Le stress également car nous savons que nous sommes pas supposés être ici, ce n’est pas le circuit touristique habituel.

Nous sommes entrés par le hall principal, nous avons donc le droit à la réception et le couloir principal desservant les différents blocs : chirurgie, dentiste, ORL, toutes les médecines sont regroupés au rez-de-chaussée.

Tout le matériel médical est resté sur place, rien n’a bougé. Il s’agit pourtant probablement de machines coûtant très cher.

Côté dentiste, il semble que les patients étaient gérés à la chaîne comme en témoigne les 4 fauteuils de dentiste dans la même pièce. J’imagine le bruit avec 4 appareils qui tournent en même temps !

La pièce qui nous impressionnera le plus sera le bloc opératoire, avec son lot d’outils et les deux gros éclairages.

Nous montons au premier étage où semble être regroupé l’ensemble des chambres pour les patients.

Elles se ressemblent beaucoup, il y a parfois 6 lits par chambres. Les chats semblent avoir eux aussi trouvés une entrée car leurs traces sont présentes (excréments, traces de griffes).

Nous tombons sur la maternité avec sa couveuse.

Nous sortons de l’hôpital pour finir dans le petit village que nous supposons être le lieu de détente des mineurs et de leurs familles. Nous y trouvons une réplique parfaite de rue commerçante japonais avec café, bar et restaurants. Le tout abandonné et dans un sale état. Nous ne nous y arrêterons pas.

Plus bas, nous trouverons tout de même des dames âgées qui ne manqueront pas de nous saluer de loin, notre visite semble les sortir de leur quotidien. Elles sont à deux pas de la plage, qui nous offrira une superbe dernière vue.

Nous quittons Ikeshima que nous n’avons pas pu visiter entièrement, mais nous ne voulons pas louper notre bateau. Nous savons bien que ce genre de visite ne plaira pas à tout le monde, mais nous avons adoré de notre côté.

9 réflexions sur “ Visite de l’île abandonnée d’Ikeshima ”

    • 7 avril 2018 à 0 h 36 min
      Permalink

      T’as vu !? 😉

      On va peut-être faire du geocaching sur notre prochaine destination !

      J’ai d’ailleurs vu qu’il y avait deux caches sur cette fameuse île !

  • 6 avril 2018 à 19 h 45 min
    Permalink

    Ouha quoi …. spécial mais intéressant ! Vous voyez vraiment de tout quand même ! Les textes sont tjrs aussi intenses on aime beaucoup ! Notre fiston Kevin est rentré ce soir à la case après 15 jours en foyer sur lescar ! Tout c’est bien passé et il demande pour la première fois d’y rester pour de bon ! On voit ça pour la rentrée de septembre on verra bien … aujourd’hui chez nous super temps 24 degrés ! Mais cela devrait se dégrader . En espérant qu’il fait beau au Japon ! J’ai réussi à trouver 2 cerisiers fleurs comme au Japon pour mon client ! Trop forte Tata ! J’ai bataye quand même … alors si vous pouviez m’en faire venir de là-bas ! Je suis preneuse gros bisous à vos deux ps: c’est étrange … nous n’avons pas eu de photos de vos repas ? ❤️

    Réponse
    • 7 avril 2018 à 0 h 34 min
      Permalink

      Impossible de ramener quoi que ce soit de vivant du Japon, sinon on aurait déjà ramener des pousses d’érables : 😉 Bien joué pour tes cerisiers.

      Au niveau repas nous n’avons pas mangé sur l’île, nous avons attendu le soir une fois rentrés sur Nagasaki, je crois que l’on a fait un ramen.

      Grande année pour Kévin alors !

  • 7 avril 2018 à 19 h 20 min
    Permalink

    Super intéressante cette visite !! Sans être aller aussi loin dans les explorations urbaines, nous avions contemplé quelques bâtiments abandonnées ou convertis en musée pendant notre périple. C’est toujours plus facile de se projeter dans le passé qu’avec des lieux toujours utilisés. On est vite chargé d’émotion !! Merci pour la visite !

    Réponse
  • 3 mars 2020 à 2 h 14 min
    Permalink

    Bonjour peut on y habiter sur cette île ?

    Réponse
    • 3 mars 2020 à 10 h 02 min
      Permalink

      Bonjour Wendy,

      Il semble que la population soit plutôt amener à décroitre sur l’île. Nous n’avons pas constaté la présence d’habitants qui n’étaient pas initialement déjà sur l’île quand l’activité liée au charbon existait. Il est donc fort probable que le gouvernement Japonais n’accepte pas de nouveaux habitants (ce qui ne serait pas surprenant compte tenu du risque lié aux vieilles installations et immeubles vétustes).

      Bonne journée.

  • 8 novembre 2020 à 17 h 12 min
    Permalink

    bjr j’ai un projet pour cette ile pourrais je parler avec vous afin de poser des questions svp

    Réponse
    • 8 novembre 2020 à 17 h 28 min
      Permalink

      Bonjour, je vous envoie un mail 😉

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *